Zeddour Brahim Belkacem, connu sous le nom de Si Kacem, est une figure emblématique de la révolution algérienne. Né à Oran en 1923, il est devenu le premier étudiant martyr de la lutte pour l’indépendance de l’Algérie. Son parcours exceptionnel, ses contributions au mouvement nationaliste et son sacrifice ultime ont marqué l’histoire de son pays. Cet article explore en détail la vie, l’engagement et l’héritage de cet homme remarquable.
Les premières années : une jeunesse brillante
Zeddour Brahim Belkacem voit le jour le 2 février 1923 à Oran, au numéro 5 de la rue Cambronne, dans le quartier Saint Antoine. Issu d’une famille respectée, il est le fils de Si Tayeb El Mehadji, une éminente personnalité religieuse et le grand imam de la ville d’Oran.
Une éducation précoce et brillante
Dès son plus jeune âge, Zeddour fait preuve d’une intelligence exceptionnelle :
- À seulement 9 ans, il termine l’apprentissage du Coran
- En 1937, à l’âge de 14 ans, il obtient brillamment son certificat d’études primaires à l’école Pasteur
Cette réussite scolaire précoce est d’autant plus remarquable qu’elle intervient à une époque où l’accès à l’éducation était limité pour les Algériens sous domination coloniale.
L’éveil d’une conscience nationaliste
Après ses études primaires, Zeddour poursuit sa formation auprès de son père jusqu’à l’âge de 22 ans. Cette période est cruciale dans la formation de sa pensée et de ses convictions politiques.
Les débuts de l’engagement
À l’âge adulte, Zeddour ouvre un commerce de couvertures traditionnelles à Médina Jdida. Ce magasin devient rapidement une couverture pour ses activités politiques clandestines. Il adhère très jeune au Parti du Peuple Algérien (PPA), une organisation nationaliste interdite par les autorités coloniales.
Le magasin de Zeddour sert de lieu de rencontre pour les militants nationalistes. Des figures importantes du mouvement comme Hamou Boutlélis et Si Abdelkader Maâchou s’y retrouvent régulièrement pour imprimer des tracts et organiser des actions de résistance.
Les manifestations de 1945 et la première arrestation
L’année 1945 marque un tournant dans l’engagement de Zeddour. Il joue un rôle actif dans l’organisation des manifestations du 8 mai 1945, qui se soldent par une répression sanglante de la part des autorités coloniales. Ces événements, connus sous le nom de massacres de Sétif et Guelma, sont considérés comme un prélude à la guerre d’indépendance algérienne.
Suite à ces manifestations, Zeddour est arrêté avec d’autres militants. Ils sont :
- Interrogés et incarcérés à la prison civile d’Oran
- Puis transférés à la prison militaire de la ville
- Inculpés de trahison et d’atteinte à la sûreté extérieure de l’État
Cette première expérience carcérale, loin de le décourager, ne fait que renforcer ses convictions nationalistes.
La quête du savoir : un parcours universitaire brillant
Libéré le 30 janvier 1946, Zeddour décide de poursuivre ses études supérieures. Son parcours académique témoigne de ses capacités intellectuelles exceptionnelles et de sa soif de connaissances.
L’expérience à l’Université Zitouna de Tunis
Zeddour s’inscrit à la prestigieuse Université Zitouna à Tunis. Ses résultats au test d’admission sont si impressionnants qu’il est directement admis en troisième année. En seulement deux ans, il obtient la Ahliya, le diplôme sanctionnant les études de cette institution, signé par le célèbre Cheikh Mohamed Tahar Ben Achour.
Les études au Caire : l’approfondissement des connaissances
À l’automne 1949, Zeddour part pour Le Caire et s’inscrit à l’université Fouad 1er, à Dar El Ouloum. Il y prépare une licence en lettres, choisissant un cursus impressionnant par sa diversité linguistique :
- Anglais
- Persan
- Français
- Espagnol
- Allemand
- Hébreu
- Arabe
Cette formation polyglotte lui permet d’acquérir une compréhension approfondie des cultures et des littératures du monde.
En septembre 1953, Zeddour obtient sa licence avec brio. Son séjour en Égypte, qui dure près de quatre ans, est une période cruciale dans sa formation intellectuelle et politique. Au contact des sommités arabes, il développe davantage ses connaissances de la civilisation arabo-musulmane et affine sa culture religieuse déjà étendue.
L’engagement politique et intellectuel
Durant son séjour au Caire, Zeddour ne se contente pas d’étudier. Il s’engage activement dans la promotion de la cause algérienne et devient l’un des plus fervents défenseurs de l’indépendance de son pays.
Une plume au service de la cause nationale
Zeddour met à profit ses talents d’écrivain et ses connaissances pour sensibiliser le monde arabe à la situation en Algérie. Il contribue régulièrement à des revues prestigieuses telles que :
- Da’awat El Haq
- Al-Ahram
Ses articles traitent de sujets variés, allant du Fiqh (jurisprudence islamique) à l’exégèse, en passant par la rhétorique, la littérature et l’histoire. Cependant, ses sujets de prédilection restent l’arabité, l’Islam et les problèmes liés à la colonisation.
Le retour en Algérie et l’intensification de la lutte
En mars 1954, sur les conseils de son père, Zeddour rentre en Algérie. Il refuse plusieurs propositions d’enseignement émanant d’universités arabes (Égypte, Koweït) pour se consacrer pleinement à la lutte pour l’indépendance de son pays.
Cette année 1954 est cruciale dans l’histoire algérienne. Zeddour, fort de son expérience égyptienne et de plus d’une décennie de militantisme, s’implique activement dans la préparation du soulèvement. Il participe à la création du Comité Révolutionnaire d’Unité et d’Action (CRUA), aux côtés de figures emblématiques telles que :
- Mohamed Boudiaf
- Mostefa Benboulaid
- Larbi Ben M’hidi
Ces rencontres à Oran, à la veille du déclenchement de la guerre de libération nationale, témoignent de l’importance de Zeddour dans le mouvement révolutionnaire.
Le sacrifice ultime : arrestation et martyre
Le déclenchement de la guerre de libération le 1er novembre 1954 marque le début d’une période tragique pour Zeddour Brahim Belkacem.
Les derniers jours de liberté
Dès le 2 novembre, Zeddour est arrêté une première fois par la Direction de la Sûreté du Territoire (DST), puis relâché. Cette brève détention ne fait que renforcer sa détermination. Pendant les jours qui suivent, il continue à rencontrer des militants pour les préparer à la lutte qui s’annonce.
L’arrestation finale et la disparition
Le 6 novembre 1954, Zeddour est de nouveau arrêté, cette fois à son domicile. C’est la dernière fois que sa famille le verra vivant. Les informations sur son sort deviennent alors fragmentaires et contradictoires :
- Sa famille apprend qu’il est torturé sauvagement
- Son père et son frère se rendent au siège de la DST à Sidi El-Houari, où on les informe de son transfert à Alger
- Le 13 novembre, il est officiellement déclaré « évadé » des locaux de la police, une version peu crédible étant donné son état physique après les tortures
La découverte macabre
Le 30 novembre 1954, le corps de Zeddour est découvert à l’embouchure de l’Oued Hamiz. Dans un acte final d’indignité, les autorités coloniales font enterrer sa dépouille au cimetière européen de Fort-de-l’eau, loin des rites et traditions de sa foi musulmane.
L’héritage de Zeddour Brahim Belkacem
La mort de Zeddour Brahim Belkacem, loin d’éteindre la flamme de la résistance, l’a au contraire attisée. Son sacrifice a inspiré de nombreux autres Algériens à rejoindre la lutte pour l’indépendance.
Une affaire d’État
La disparition de Zeddour devient rapidement une affaire d’État sous la IVe République française. Entre 1955 et 1956, « l’affaire Zeddour » fait l’objet de débats et d’enquêtes, mettant en lumière les pratiques de torture et d’exécutions sommaires de l’administration coloniale.
Un symbole de la résistance intellectuelle
Zeddour Brahim Belkacem incarne la figure de l’intellectuel engagé dans la lutte pour l’indépendance. Son parcours académique brillant, couplé à son engagement politique sans faille, en fait un symbole puissant de la résistance algérienne. Il démontre que la lutte pour la liberté ne se limite pas au combat armé, mais inclut également une dimension intellectuelle et culturelle cruciale.
La perpétuation de la mémoire
Aujourd’hui, la mémoire de Zeddour Brahim Belkacem est honorée de diverses manières en Algérie :
- Des établissements culturels portent son nom, comme la Maison de la culture Zeddour-Brahim-Belkacem
- Des documentaires et des ouvrages historiques racontent son histoire
- Son parcours est étudié dans les écoles comme exemple de dévouement à la cause nationale
Chronologie de la vie de Zeddour Brahim Belkacem
Date | Événement |
---|---|
2 février 1923 | Naissance à Oran |
1932 (environ) | Achèvement de l’apprentissage du Coran à l’âge de 9 ans |
1937 | Obtention du certificat d’études primaires |
1945 | Participation aux manifestations du 8 mai et première arrestation |
30 janvier 1946 | Libération et départ pour Tunis |
1948 | Obtention du diplôme de l’Université Zitouna |
Automne 1949 | Départ pour Le Caire et inscription à l’université Fouad 1er |
Septembre 1953 | Obtention de la licence en lettres |
Mars 1954 | Retour en Algérie |
6 novembre 1954 | Arrestation finale |
30 novembre 1954 | Découverte du corps |
L’impact durable de Zeddour Brahim Belkacem
L’histoire de Zeddour Brahim Belkacem est bien plus qu’une simple biographie. Elle incarne les aspirations, les luttes et les sacrifices de toute une génération d’Algériens qui ont combattu pour l’indépendance de leur pays.
Un modèle pour la jeunesse algérienne
Le parcours de Zeddour continue d’inspirer les jeunes générations en Algérie.
Citations:
[1] https://capdz.dz/2020/02/17/zeddour-brahim-le-premier-etudiant-martyr-de-la-revolution-algerienne/
[2] https://fr.wikipedia.org/wiki/Belkacem_Zeddour_Mohamed_Brahim
[3] https://www.vitaminedz.com/fr/Algerie/documentaire-inedit-sur-le-martyr-belkacem-14786-Videos-0-0-1.html
[4] https://lematindalgerie.com/relents-historico-nationalistes-et-perspectives-patrimonialo-identitaires-de-lart-en-algerie/
[5] https://www.google.fr/policies/faq
[6] https://jeunessedalgerie.dz/18-fevrier-oran-rend-hommage-a-ses-martyrs-zeddour-brahim-belkacem-lintellectuel-oublie-de-lhistoire/
[7] https://shs.cairn.info/algerie-1962–9782348073038-page-447?lang=fr